La Mélodie et le Lied s'encrent à Gordes

Heureux Vaucluse ! Terre d’accueil des artistes le temps d’un concert, d’une classe, en vacances ou en résidence.

C’est le cas de Monic Cecconi-Botella qui après une carrière de professeur au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris (Analyse Musicale) a choisi d’élire domicile à Gordes. Cette femme discrète n’en est pas moins une des rares compositrices françaises. Grand prix de Rome de composition musicale en 1966, c’est à l’issue des trois années passée à la Villa Médicis, à Rome, qu’elle prit ses fonctions en tant que professeur au Conservatoire.
Ses propres compositions comportent un nombre important d’œuvres de musique de chambre et de musique vocale, ainsi que des œuvres symphoniques et plusieurs opéras. Noctuaile, sur un livret de René David, obtient le Grand Prix de l’Académie du Disque français et du Film Musical en 1984. Radio-France lui commanda La Femme de l’Ogre, sur un livret de Pierrette Fleutiaux qui représenta la France au Prix Italia en 1989. A Tours, en 1991, elle crée Il signait…Vincent, opéra-passion sur la vie de Vincent Van Gogh... Et on peut encore attribuer à son catalogue plusieurs opéras pour et par les enfants, créés dans diverses régions de France.
De 1995 à 2001, elle fut conseiller artistique pour la ville d’Enghien-les-Bains et créa aussi L’Ensemble Orchestral Thème et Variations avec lequel elle assura de nombreux concerts en région parisienne.
Passionnée par le chant, c’est encore à Enghien qu’elle crée les rencontres sur la voix: A portée de voix.
Elle ne pouvait donc se passer de ce qui n’est pas un métier, mais une passion, un mode de pensée et un art de vivre tout à la foi.
Elle repart donc dans une autre aventure et crée à Gordes en 2008 EOL -Les Saisons de la Voix consacrées essentiellement à la Mélodie et au Lied dans un double but d’aider à la promotion des jeunes chanteurs et chanteuses et de faire mieux connaître ce répertoire au public.
Formes adaptées au salon, et donc très appréciées au début du XXe siècle, la Mélodie et le Lied furent peu à peu abandonnés au fur et à mesure que les salles de spectacles devinrent les nouveaux lieux d’écoute. Se sont pourtant deux genres probablement plus abordables que l’opéra parce que les morceaux sont courts, les paroles empruntées à des textes poétiques, la prononciation excellente et le nombre d’acteurs limité à une voix et un pianiste, plus rarement un ensemble instrumental. Si la Mélodie est née avec le romantisme, aux alentours des années 1840 en France, c’est au XVIe siècle, au minimum, que remonte le Lied, en Allemagne.
Les jeunes candidats souhaitant actuellement exercer leur talent dans cette discipline ne manquent pas. Les deux précédents concours organisés par les Saisons de la voix en novembre 2008 et 2009 en sont la preuve.
Les six lauréats retenus à chaque cession se sont vu offrir trois jours de formation avec Jeff Cohen à Gordes. Car Monic Cecconi-Botella attire dans son sillage les plus grands.
Professeur au Conservatoire de Paris, Jeff Cohen a été chef de chant à l’Opéra de la Monnaie à Bruxelles, professeur à l’Ecole d’Art Lyrique de l’Opéra de Paris, responsable musical au Théâtre du Châtelet et conseiller à la Bibliothèque Nationale de France pour une série de concerts sur la mélodie française.
Il a enregistré plusieurs disques : des mélodies de Duparc, Fauré, Hahn, Gounod, Loeffler avec François Le Roux ; des lieder de Mozart au pianoforte avec Véronique Dietschy ; des chansons de Kurt Weill et de cabaret avec Ute Lemper ; deux pianos avec Noël Lee; de la musique de chambre avec Carol Robinson, Pierre Lénert, François Daudin-Clavaud, les chansons de Boris Vian avec Luis Madureira, des fados au piano avec Luisa Cruz…
Il faut dire que cet américain d’une cinquantaine d’année fait partie de cette nouvelle génération capable de s’illustrer aussi bien dans des registres classiques que plus populaires, une manière de mettre le pied à l’étrier à toute une franche de public peu intéressé spontanément par le répertoire classique.
Il a aussi composé des musiques de scène et de films : Les Sentiments de Noémie Lvovsky, Consentement mutuel de Bernard Stora, Tombés du ciel de Philippe Lioret, Riens du tout de Cédric Klapisch, Qu’est-ce qu’on attend pour être heureux ? de Coline Serreau, Les Caprices de Marianne mis en scène par Lambert Wilson et Le Jour d’avant, après, une chorégraphie de Thierry Niang.
Il se consacre pourtant essentiellement à la formation de grand chanteur lyrique, tel Roberto Alagna ou de variété. Son talent de pédagogue, son sens du contact avec les jeunes, sa façon de les faire entrer dans l’intimité de l’œuvre et la compréhension du texte font de sa présence à Gordes durant trois jours, un évènement pour ces six jeunes lauréats du concours. Notons d’ailleurs que vous et moi pourront assister en auditeur et cela gratuitement à cette master class.
On les retrouvera tous le 16 juillet 2010 aux Terrasses de Gordes en compagnie de June Anderson, soprano, invitée des plus grandes scènes européennes et des Etats-Unis et qui fera à cette occasion escale dans le Luberon.

Olivia Gazzano, paru dans le n°23 mars-avril 2010.

Cavajazzn ça swingue à Viviers

SMAC, SMAC, l’acronyme est joli : il fait un bruit de baiser dans une BD.

Et ça leur va bien à l’équipe de Cavajazz, souvent un peu farceuse, ne se prenant pas au sérieux et faisant du bon, du très bon boulot, depuis des années. En 1994, ils étaient déjà connus comme « le seul club de jazz en milieu rural « !!! Les voilà 15 ans plus tard, installés dans le petit théâtre de Viviers restauré pour eux (beau lieu, bonne acoustique), à deux pas du Rhône, et devenus Scène de Musique Actuelle Contemporaine (Smac). Pour cela, ils ont mis en commun leur programmation et leurs projets avec deux autres structures Ardéchoises: la Presqu’ile d‘Annonay et l’Art scène à Payzac. Encore une invention du milieu rural : mutualiser ses moyens du nord au sud du département pour mieux s’inscrire dans un territoire et obtenir ce label d’Etat délivré par la Direction Régionale des Affaires Culturelles, label qui leur donne les moyens d’accueillir des musiciens en résidence et de pérenniser le festival lancé en juin 2009: Jazz sous les platanes.
L’homme qui a des racines ici, c’est Philippe Euvrad, musicien-président de Cavajazz, persuadé que la musique peut être un facteur de développement du territoire. Il suffit de penser à Jazz in Marciac pour être tout de suite d’accord avec lui. D’accord aussi pour se souvenir que le Jazz a irrigué toutes les musiques du vingtième siècle et qu’aujourd’hui toutes celles qui se réclament de lui, ont droit de cité à Cavajazz. C’est naturel, c’est aussi la pertinence du lieu que de s’affirmer généraliste : jazz et musiques du monde afin de gagner un public suffisant. Public qui fait confiance aux choix de l’équipe même quand il ne connaît pas toujours les artistes, public qui apprécie la convivialité des soirées et les jolis moments des « cup of jazz », les rendez-vous des dimanches en fin d’après-midi.

Un aperçu des prochains rendez-vous de 21 h
6 novembre : General elektiks, groove, soul et rock; le 14, Marion Rampal, une « demoiselle à épines » et des chansons sauvages, jazz-rock; le 20, Emile parisien quartet… et pour ouvrir l’année, le 8 janvier le Workshop de Lyon slogan qui va « déménager » avant le rendez-vous du 23 avec la douceur d’Alvaro Bello, le chilien qui crée des ponts entre jazz et musique populaire de son pays… Et un coup de coeur pour la Cup of jazz du 6 décembre à 17 h: un duo harpe et contrebasse pour un moment d’improvisation.

Pour consulter l’intégralité du programme et écouter quelques minutes de musique de chaque spectacle à venir: http://www.cavajazz.fr/